A l’occasion de la conférence du 10 décembre 2014 dans le cadre du Forum Les Débats de l’Ecole des Mines de Nancy.
La société façonnée par Internet est fondée sur une promesse de participation généralisée. Pour certains, cette promesse est aussi synonyme de déclin de la qualité du niveau du débat politique, d’obscurantisme, d’une surenchère d’éléments irrationnels et de rumeurs incontrôlées. La menace d’une disruption des équilibres culturels et sociaux traditionnels est aujourd’hui incarnée par des figures diverses et variées de saboteurs de l’harmonie sociale dans la société connectée : les « anonymes » qui attaquent les hommes politiques et les célébrités, les vandales qui défigurent les pages des marques ou les articles de Wikipédia, les faux profils qui créent la pagaille dans les réseaux sociaux numériques et dans les sites de rencontres…
Le troll est l’archétype humain qui résume toutes ces menaces : synonyme d’internaute qui tient des propos enflammés et qui parasite la conversation en ligne. Emprunté aux mythologies nordiques, cette figure s’est progressivement érigée en ennemi commun de l’internet.
Le rêve d’un « internet civilisé », colporté par les droites européennes depuis la moitié des années 2000, ne peut pas être appréhendé d’un point de vue critique si nous ne comprenons pas ce qu’est une civilisation et sur quelles valeurs elle s’appuie.
Se pencher sur ces formes de « barbarie digitale » permet alors de répondre à une question foncière : en quels termes et dans quelle mesure pouvons-nous parler d’une civilisation numérique ?