Une enquête unique a été conduite sur un échantillon de 1022 citoyens iraniens par une équipe de chercheurs de l’Iran Media Program (Annenberg School of Communications de l’Université de Pennsylvanie) en collaboration avec Gallup. Le rapport final Finding a Way – How Iranians reach for news and information est disponible en ligne. Voilà quelques résultats saillants :
1) Les médias traditionnels (mélangés avec des liens forts “de proximité”) restent les sources d’information majoritaires : la télévision est le premier choix pour 96% des interviewés. La chaîne d’état IRIB demeure la plus regardée (62%), suivie par BBC Persian et Voice of America (accessibles par satellite). La presse suit, mais avec un écart important (45%). Peux après, l’information directe par les pairs, les amis, les voisins, les membres de la famille (38%). Avec ces derniers, on peut supposer que certains échanges se réalisent en ligne – par mail, chat ou sur des médias sociaux (mais ce résultat est mitigé, v. point 2). D’autant plus que la recherche d’information dans des lieux publics (transports, commerces, lieux de culte, etc.) n’est plus vraiment d’actualité à cause du climat politique actuel.
2) Les utilisateurs d’Internet ne sont pas très “participatifs” : 42% des usagers se limite à la simple lecture de blogs, alors qu’à peine 18% laissent des commentaires et 8% ont leur propre blog. Seulement 20% des internautes iraniens sont inscrits sur des médias sociaux. Parmi ces derniers, Twitter est en queue de classement – juste 2% des internautes s’en servent. De quoi remettre en question les enthousiasmes de ceux qui ont salué les révoltes iraniennes de 2009 en les qualifiant de “révolution Twitter” …
3) La présence des mobiles se confirme : la quasi totalité des interviewés (96%) ont un téléphone cellulaire dont ils se servent pour envoyer des textos. Presque un tiers de l’échantillon déclare avoir aussi des usages plus avancés, comme par exemple envoyer des données via Bluetooth. Si le pourcentage d’utilisateurs de téléphonie mobile semble disproportionné, même pour un pays comme l’Iran, cela est peut être dû au fait que les interviewés sont exclusivement des résidents de zones urbaines.
4) Les outils pour contourner la censure des sites Web sont peu connus et peu utilisés : 73,5% des interviewés n’en ont jamais entendu parler. Parmi le restant 26,5%, une majorité relative est convaincue de la facilité d’avoir accès aux dispositifs anti-censure, mais ils déclarent ne pas être sûrs d’avoir les compétences informatiques requises (46% se définit comme “insecure or very insecure”). Une leçon importante pour les concepteurs de logiciels, protocoles et outils pour empêcher le filtrage d’Internet : travailler sur la convivialité des interfaces et la facilité d’usage afin d’encourager l’adoption de la part de ceux qui ont particulièrement besoin de ces outils : les citoyens d’états soumis à une censure obtuse et délétère.